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F comme...
FRANQUIN
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A
propos de... Q.R.N.sur Bretzelburg
(653Ko)
Le 19 mars 1997, à Neuilly sur Seine.
©Benoît Mouchart |
Par
un étonnant concours de circonstance, Michel Regnier obtient, à l'âge
de dix-sept ans, un rendez-vous avec le directeur du Journal
de Spirou, Charles Dupuis. Ce dernier, bien qu'il ait trouvé très
mauvais les dessins que lui apporte le futur Greg, griffonne sur un papier
l'adresse d'un dessinateur qui pourrait peut-être l'aider à faire des
progrès...
Greg
: «C'était Franquin ! Mon Dieu ! Je suis allé chez lui deux à trois
fois par semaine et il m'a appris par quel bout tenir un crayon. Je lui
amenais des bandes que je ne destinais pas à la publication et que je
voulais qu'il corrige. Ses corrections étaient si nombreuses qu'elles
recouvraient complètement mes dessins. Je ne savais pas si je devais me
réjouir ou me désespérer d'un tel traitement. Mais quel professeur !»
Félix, Modeste,
Pompon et leurs neveux ( © Dupuis)
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Après
s'être disputé avec Dupuis pour une question de droits d'auteur, Franquin
crée en
1955 une nouvelle série pour le Journal de Tintin : Modeste
et Pompon. Réconcilié avec Dupuis un an plus tard et reprenant les aventures
de Spirou, le dessinateur se trouve
vite dépourvu de nouvelles idées pour Modeste et Pompon. C'est alors que Franquin fait appel à Greg pour
que ce dernier lui écrive des gags.
Greg
: «Franquin avait tenté de travailler avec Goscinny, mais ce dernier
voulait lui imposer son style. Or, Franquin était un animal sauvage que
l'on ne pouvait que difficilement dompter. Un jour, à la demande de Franquin,
j'ai modifié un gag de Goscinny. Ce dernier l'a trouvé très amusant, mais
il a refusé qu'il paraisse. Alors Franquin m'a demandé si je n'avais pas
une autre idée et je suis revenu la semaine suivante avec cinq gags, et
voilà ! À force de voir Franquin dessiner et corriger mes propres dessins,
je savais vraiment d'avance comment il traduirait graphiquement mes scénarios.»
Greg
ne se contenta pas d'inventer de nouvelles situations comiques mettant
en avant la mauvaise humeur et l'impulsivité de Modeste. Il imagina surtout
une foule de personnages truculents : le voisin Ducrin, l'oncle Symphorien
et son coq, le bébé de la cousine Améthyste, etc. Avec Greg, le cousin
Félix, qui invente de nouveaux gadgets inutiles et catastrophiques, devient
de plus en plus gaffeur. «Je crois
qu'il a produit plus de scénarios que moi, confiait Franquin dans
la préface d'une réédition de Modeste
et Pompon. Nous avions la même
conception des personnages et nous nous entendions très bien tous les
deux.» Après l'abandon de Franquin, Greg continua d'écrire un court
moment quelques gags de cette série pour Dino Attanasio, sans toutefois
être aussi inspiré qu'auparavant. En tout cas, Franquin sait dorénavant
qu'il peut se reposer sur Greg pour renouveler un peu son inspiration.
© Dupuis
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C'est ainsi que les deux hommes
signent ensemble six aventures de Spirou
: La peur au bout
du fil (1957), Le
prisonnier du Bouddha (1958),
Tembo Tabou (1958),
Z comme Zorglub (1959),
L'Ombre du Z (1960) et QRN
sur Bretzelburg (1961). |
Avant
Greg, les aventures de Spirou
étaient avant tout fondées sur la fantaisie et l'exotisme, à travers
les inventions curieuses du comte de Champignac ou les comportements étranges
du poétique Marsupilami. Avec
Greg, la série prend un ton légèrement différent et les histoires commencent
à refléter de façon explicite l'état d'esprit politique de l'époque. Ainsi,
dans Le prisonnier du Bouddha,
Spirou et Fantasio découvrent que le monde est constamment menacé de destruction
par le conflit latent qui oppose les blocs de l'Est et de l'Ouest.
Greg
: «On ne peut faire du bon humour qu'avec des choses qui, si elles étaient
vraies, seraient terrifiantes.»
Avant
Greg, les scientifiques de Spirou étaient d'aimables
distraits, toujours plongés dans les recherches et les équations.
Le scénariste leur donne une tout autre dimension, en montrant que
leurs inventions peuvent très bien se retourner contre l'Homme.
Ainsi,
le métomol, ce gaz rose découvert par Champignac qui rend mou tous
les métaux, pourrait devenir une arme terrible en cas de conflit.
Quant au savant fou Zorglub, il ne développe ses investigations
scientifiques que dans le seul but de conquérir le monde.
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Greg
: «Zorglub n'est un personnage méchant que parce qu'il est ravagé par
une ambition démentielle. Évidemment, c'est une caricature. Mais prenons
par exemple quelqu'un comme Wernher von Braun : était-il gentil ou méchant
? D'accord, il a permis aux fusées d'aller sur la Lune, mais il a quand
même inventé des bombes chargées de démolir Londres ! Un scientifique
n'est ni gentil ni méchant : il fait son boulot. Son triomphe réside dans
la réussite technique de son invention.»
Franquin et Greg
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Pour
cette collaboration, Franquin confiait ses envies graphiques du
moment à Greg, qui composait ses histoires à partir de ces éléments.
La collaboration entre Franquin et Greg fut éminemment fructueuse
et donna à Greg ses lettres de noblesse en tant que scénariste.
Les albums qu'il écrivit pour Spirou
restent aujourd'hui encore parmi les meilleures ventes de
la série.
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Vingt-cinq
ans après QRN sur Bretzelburg, Franquin et Greg se retrouvent pour donner une
nouvelle vie au Marsupilami,
désormais héros à part entière d'une nouvelle série.
Lettre de Franquin
à Greg
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Greg
: «Je vivais en Amérique. À cette époque, il n'y avait pas encore de fax
et les télex n'étaient pas compatibles. Nous nous sommes bien énervés
sur ce truc, d'autant plus qu'il y avait une grève de La Poste. Je me
suis bien amusé avec La queue du
Marsupilami, puis nous nous sommes arrêtés au deuxième épisode. Peu
de dessinateurs âgés conservent le côté moine miniaturiste de ce métier.
Franquin l'a gardé jusqu'au bout.»
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